Violence obstétricale et consentement : comprendre et agir
La question des violences obstétricales est aujourd’hui un sujet de plus en plus discuté au Québec et ailleurs. Ce phénomène, longtemps invisibilisé, soulève des enjeux essentiels de droits, de dignité et de respect des femmes et des personnes qui vivent une grossesse ou un accouchement. Les témoignages se multiplient, les recherches commencent à voir le jour, et pourtant de nombreuses femmes continuent de vivre des actes ou des propos sans leur consentement, parfois traumatisants.
Cet article propose de clarifier ce que recouvre le terme de violence obstétricale, de comprendre ses conséquences, et de voir comment il est possible de prévenir ces situations, notamment grâce à un meilleur accompagnement et à l’implication des doulas.
Introduction à la violence obstétricale
La violence obstétricale désigne l’ensemble des pratiques ou interventions médicales réalisées lors de la grossesse, de l’accouchement ou du postnatal qui ne respectent pas le consentement de la patiente. Elle peut prendre différentes formes : gestes non consentis, paroles humiliantes, infantilisation, ou encore manque d’information sur les traitements proposés empêchant un choix libre et éclairé.
Le terme est apparu dans le débat public pour qualifier un phénomène vécu par de nombreuses femmes, mais rarement nommé. Il met en lumière un déséquilibre dans la relation de soins, où le savoir médical prime parfois sur l’écoute et le respect de la personne concernée.
Historique et contexte
Historiquement, la coopération de la médecine lors l’accouchement au XXᵉ siècle a permis des avancées majeures pour réduire la mortalité maternelle et infantile, grâce notamment a l’augmentation de l’hygiène ou les antibiotiques. Mais cette médicalisation à outrance s’est aussi traduite par une perte d’autonomie pour les femmes et par une normalisation d’actes invasifs.
Depuis quelques années, des mouvements citoyens, des collectifs de patientes et des travaux universitaires dénoncent ce phénomène. Les témoignages circulent largement sur les réseaux sociaux, révélant que, malgré les progrès, de nombreuses expériences d’accouchement se soldent par un sentiment de violence ou de perte de pouvoir.
Au Québec, comme dans d’autres pays, le contexte actuel montre une tension entre la volonté d’offrir des soins sécuritaires et la nécessité de garantir les droits et le consentement des femmes.
Définition du consentement
Le consentement est la clé d’une relation de soins respectueuse. Il implique que la personne ait reçu une information claire, compréhensible et adaptée à sa situation. Donner son consentement, c’est pouvoir dire « oui » en toute connaissance de cause, mais aussi avoir la liberté de dire « non » ou de poser des questions.
En obstétrique, le consentement doit être recueilli avant tout acte médical, qu’il s’agisse d’un toucher vaginal, d’un déclenchement ou d’une injection. Or, trop souvent, ce principe est négligé, ce qui crée des situations de violence.
Impacts et conséquences de la violence obstétricale
Conséquences physiques et psychologiques
Les violences obstétricales ne se limitent pas à un ressenti subjectif : elles peuvent avoir des impacts physiques et psychologiques durables. Sur le plan physique, certaines femmes souffrent de complications liées à des actes réalisés sans préparation adéquate (douleurs chroniques, cicatrices difficiles, troubles sexuels ou urinaires).
Sur le plan psychologique, les conséquences peuvent être encore plus lourdes : anxiété, stress post-traumatique, perte de confiance envers le système de santé, voire difficulté à envisager une nouvelle grossesse. Le sentiment d’avoir perdu sa voix, d’avoir été traitée comme un objet, laisse des traces profondes et traumatiques.
Les témoignages montrent que même un simple propos humiliant pendant l’accouchement peut marquer la mémoire d’une femme pendant des années. C’est pourquoi de plus en plus de plaintes sont déposées auprès des ordres professionnels ou des instances de régulation.
Violences obstétricale et périnatalité
Dans le contexte périnatal, la violence obstétricale prend une dimension particulière. L’accouchement est un moment fondateur, qui influence la manière dont une mère et un bébé commencent leur vie ensemble.
Une expérience marquée par la violence peut fragiliser le lien mère-enfant, compliquer l’allaitement et augmenter le risque de dépression post-partum. De plus, elle peut entraîner une perte de confiance dans les soins médicaux, ce qui impacte la santé à long terme.
Au Québec, certaines recherches mettent en évidence que les femmes issues de groupes marginalisés (immigrantes, autochtones, personnes en situation de pauvreté) sont davantage exposées à ces violences, révélant un enjeu de genre, mais aussi de justice sociale et raciale.
Être accompagnée pour prévenir
Les choses nécessaire pour prévenir les violences gynécologiques
La prévention des violences obstétricales repose sur plusieurs piliers.
D’abord, une meilleure information : chaque patiente doit comprendre les actes et traitements qui lui sont proposés. Cela implique une communication claire du personnel soignant et une disponibilité pour répondre aux questions.
Ensuite, une évolution des pratiques : offrir le choix de la position d’accouchement, limiter les gestes invasifs non nécessaires, et favoriser une approche centrée sur la personne plutot que sur le protocole.
Enfin, un véritable respect des droits : reconnaître que les femmes ne sont pas seulement des patientes passives, mais des actrices à part entière de leur travail et de leur accouchement. Le consentement doit devenir une évidence, pas une formalité.
Rôles des doulas
Les doulas jouent un rôle essentiel dans la prévention des violences obstétricales. Leur mission n’est pas médicale, mais relationnelle. Elles offrent une présence continue, rassurante et informée auprès des femmes et des familles.
Une doula peut aider la personne à se préparer en amont, en l’accompagnant dans sa démarche d’information, en l’aidant à clarifier ses objectifs et ses souhaits pour l’accouchement. Elle peut aussi soutenir la communication avec le personnel médical, en rappelant l’importance du consentement et du respect des droits.
Dans plusieurs cas, la présence d’une doula réduit la perception de violence, car elle permet à la femme de se sentir écoutée, entourée et mieux armée pour traverser les imprévus.
Au Québec, de plus en plus de familles choisissent ce type d’accompagnement, parfois en complément d’un suivi hospitalier, pour sécuriser leur expérience et réduire le risque de traumatismes.
Conclusion
La violence obstétricale n’est pas une fatalité. Ce phénomène, aujourd’hui mieux nommé et mieux étudié, appelle une transformation des pratiques médicales et une véritable reconnaissance des droits des femmes et des personnes.
Comprendre ce que recouvre le terme, écouter les témoignages, identifier les conséquences et proposer des ressources, voilà ce qui permet de faire évoluer les mentalités.
Le respect du consentement est au cœur de cette évolution : sans lui, aucun soin ne peut être pleinement respectueux. Les doulas, aux côtés des familles, sont des actrices clés pour prévenir ces situations et redonner aux femmes le pouvoir de vivre leur accouchement avec dignité.
Il est urgent de continuer la recherche, d’ouvrir la parole et de soutenir les interventions qui favorisent des soins plus humains. Parce que chaque personne mérite de traverser cette étape unique de sa vie sans violence, avec respect et avec la certitude que sa voix compte.